Enlèvements d’enfants,
sacrifices humains, crimes d’horreur, des organes humains amputés, des menaces
d’assassinat proférées au quotidien. C’est ce qui fait l’actualité du moment, au
Bénin. Au banc des accusés, des cybercriminels et des dignitaires appelés
"Hounon". Une situation qui demeure une énigme à résoudre. Mais en attendant, la peur s’empare des
populations, qui observent avec passivité se dérouler, le macabre feuilleton. Pour
mieux comprendre le phénomène, nous avons interrogé pour vous, Sylvain Adoho,
alias "Maître Bobos". Consultant de Fâ, spécialiste des questions
endogènes, il nous révèle, sans langue de bois, des secrets plutôt croustillants sur l’usage
des organes humains dans la tradition béninoise, avec à la clé, des pistes de
solution pour arrêter l’hécatombe. Et c’est à travers une interview qu’il nous
a accordée. Lisez plutôt.
Nous assistons aujourd’hui à des enlèvements d’enfants, à des crimes
odieux à des fins de rituels à certaines divinités. Est-ce la tradition qui
exige aussi les crimes humains ?
Maître Bobos : Je dirai que si la tradition avait
réellement un lien avec les sacrifices humains, je crois qu’il n’aurait plus
d’hommes sur la terre. La tradition n’a donc rien à voir avec ces crimes
odieux. L’essentiel à comprendre, c’est que depuis toujours, nos parents ou
certains garants de la société avaient toujours un secret sur lequel il
s’adosse pour lutter contre l’ennemi. Et il y avait toujours des notions, des
connaissances qui leur permettaient d’affirmer leur autorité dans la société.
Avant même l’arrivée des colons, il y avait déjà ces notions chez nous.
Seulement que cela ne nécessitait pas des sacrifices humains. Il y avait des animaux
féroces qu’on pouvait utiliser pour renforcer la capacité des divinités. Il
s’agit, entre autres, des chats, des chiens, des rapaces, des aigles.
Malheureusement, aujourd’hui, force est de constater que les gens utilisent le
sang humain en sacrifice pour renforcer ces divinités.
Dans nos investigations
et au regard de l’actualité, il ressort que certaines divinités sont constituées à base
d’organes humains. Et des dignitaires comme les "Hounons" en
témoignent. En tant que chercheur et spécialiste des questions endogènes, que
pourriez-vous dire ?
A vrai dire, que des divinités soient constituées à base
d’organes humains, je vous répondrai tout simplement que je ne connais pas
cette notion pour mieux satisfaire votre préoccupation. Ce sont ces Hounons qui
en témoignent, qui doivent peut-être nous éclairer dans cette dimension des
faits. L’essentiel à retenir, c’est qu’apprivoiser une entité demande tous les
règnes. Et lorsqu’on prend les règnes, il y a le règne minéral qui est l’eau,
le règne végétal que constituent les feuilles, le règne animal et autres. Je
dois préciser que l’homme fait partie du règne animal. En tant que tel,
lorsqu’on veut constituer une divinité, on peut utiliser un animal et non un
être humain. Par exemple, lorsqu’on veut constituer la divinité
"Lègba", on peut utiliser soit un bélier, soit un cop bien en forme.
On n’a donc pas besoin d’un homme avant de le faire. Mais je dois avouer que
dans l’ancien temps, la colère, de la guerre, amenait certains rois à enterrer
des esclaves et à ériger le Lègba dessus, juste pour montrer leur suprématie.
Il y avait également certains sièges des rois montés sur des crânes humains. A
titre d’exemple, nous pouvons citer le tabouret royal du roi Ghézo qui était
monté sur trois crânes humains. Tout ceci pour
démontrer sa puissance et montrer aux autres qu’il n’est pas un roi
ordinaire. Je sais aussi qu’au temps des premiers hommes, c’est-à-dire de
Rumila, il y avait aussi des divinités comme AléIfè qui pouvaient prendre du
sang humain. Mais à l’arrivée de Rumila, ces pratiques ont été abolies et des
animaux sont utilisés pour constituer les mêmes divinités dotées des mêmes
puissances.
Les sacrifices humains
ont-ils réellement une histoire dans la tradition béninoise ?
Expliquez-nous, si oui.
Il fut un moment où les gens étaient tués. Mais ils ne le
sont pas pour des divinités. Aucune des dix divinités de la tradition n’avait
donc besoin de sang humain pour fonctionner. Je viens de citer par exemple les
règles pour lesquelles on avait besoin de certains ossements qui ne sont pas
trop loin du taux vibratoire de l’homme. Cela veut dire donc qu’on n’a pas
besoin de l’homme pour lesdits règnes. Car, l’homme, dans son essence, est
sacré et il ne faudrait pas chercher à le massacrer. Mais quand je rentre dans
le Fâ "Gouda fo troukpin", je
crois qu’il y est dit qu’on pouvait tuer des hommes à la divinité
"Dan" pour que la pluie tombe. A un moment donné, certains
dignitaires sont allés tuer cette divinité "Dan", pour mettre fin aux
crimes odieux dont nous parlons actuellement.
En tant que promoteur
de l’Ong Chandelier de la Paix, quel message avez-vous à l’endroit des
populations désormais affolées par ce phénomène qui prend de l’ampleur dans
notre pays ?
Je voudrais dénoncer le calme parfait de la population face à
ce drame. Il faudrait qu’elle se mette en accord avec le gouvernement pour
jouer le rôle qui est le leur. Car, nous les Baconon, lors du Bénin Tofâ, cette année, nous avons bien dit de faire attention,
qu’il y aura perte d’enfants, des sacrifices d’enfants. Mais malheureusement,
personne ne nous a écoutés, parce que les responsables des religions importées
sont plus écoutés que nous autres qui sommes de la tradition. Du coup, ce que
dit la tradition n’intéresse personne et ce sont les conséquences que nous
sommes en train de vivre ensemble.
Un mot de
conclusion ?
Ce que je m’en vais ajouter, c’est que c’est maintenant ou
jamais de nous lever tous, pour lutter contre ces crimes odieux qui s’observent
dans notre pays. Et je crois que lorsque certains dignitaires et Boconon vont
s’unir pour consulter le Fâ sur la méthode à adopter pour arrêter la saignée,
des révélations seront faites et les sacrifices seront exécutés pour que nous
puissions bannir notre société de ces crimes-là. On peut faire en sorte que
lorsque ces gens vont vouloir commettre leur forfait, qu’ils aient eux-mêmes
des ennuis, pourquoi pas des accidents de route qui les empêcheraient d’agir.Il
faut aussi dénoncer ces gardiens de la tradition qui s’adonnent à ces pratiques
pour éviter à notre population, cette peur.
Propos recueillis par
Donatien GBAGUIDI
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