L’exercice est fastidieux et harassant. Car il nous impose
rigueur et vigilance. Deux vertus cardinales avec lesquelles des journalistes
culturels avisés, à la plume aiguisée, se sont familiarisés des mois durant
pour en sortir des résultats tout aussi révélateurs de leur engagement pour une
culture béninoise rayonnante qui respire qualité et admiration. Ces résultats
obtenus après le marquage à la culotte opéré aux acteurs ciblés, dans leurs
faits et gestes sur la scène culturelle et artistique, pourraient nous valoir
quelques inimitiés que nous assumerons volontiers. Car, il est bien temps que
la plume du journaliste culturel béninois ne serve plus à encenser exclusivement,
mais à rendre justice à ceux qui s’échinent, malgré tout, à honorer nos arts et
cultures, de par la qualité de leurs actes et décisions.
Pour cette première
phase de cet exercice peu ordinaire sous nos cieux, la cible est toute trouvée.
Il s’agit d’évaluer les autorités en charge de la culture béninoise, avant de
s’intéresser aux acteurs culturels. Et au nom de la méthode et de la qualité,
les autorités ciblées sont classées dans différentes poules. La poule A met en
compétition, le Ministre du tourisme et de la culture, Ange N’Koué, le
Directeur du Festival international de théâtre du Bénin (Fitheb), Erick-Hector
Hounkpè, le Directeur des arts et du Livre (Dal), Léon Zoha et le Directeur du
patrimoine culturel (DPC), Didier Houénoudé. Ces quatre autorités en charge de
la culture sont soumises à l’évaluation des journalistes en question, à travers
trois critères que sont : l’engagement et l’amour pour la culture, les
actions et réalisations, la visibilité et l’aura auprès des journalistes
culturels. Passés au crible de ces critères, les mieux quottés dans
l’évaluation sont révélés au public et sont aussitôt mis en compétition avec des
lauréats d’autres poules aussi connues pour subir les différentes phases de
l’évaluation. Et c’est après ça que ceux qui ont résisté au tamis des
journalistes culturels pourront subir l’épreuve finale de cette fastidieuse
compétition. A la finale en effet, la meilleure autorité administrative de la
culture est révélée pour servir d’exemple. Et cet exercice, l’ère de la rupture
nous l’impose. Cette ère qui fait mainmise sur tout financement de la culture
et des arts. Une situation dont profitent allègrement plusieurs autorités en
charge de la culture et des acteurs culturels. Ils s’y refugient et se noient
dans un immobilisme gênant, qui creuse davantage la tombe à l’animation
culturelle. Et certains, lorsqu’ils agissent, c’est pour prendre le contre-pied
de ce qui est logique pour le dégel de la situation de blocage à laquelle est
soumis le Fonds d’aide à la culture, l’unique guichet public permettant de
subventionner et d’appuyer la création artistique et culturelle dans notre
pays. Des faits, gestes et décisions qui font braquer tous les acteurs de la
chaîne et qui plombent de plus en plus, l’espoir de la renaissance culturelle et
artistique au Bénin. Et pourtant, dans cette galère entretenue par le gel des
plans de travail annuel (PTA) de la plupart des Directions sous tutelle du
Ministère du tourisme et de la culture, certains refusent de s’abandonner à
l’inaction. Ceux-là méritent bien d’être célébrés pour servir d’exemple dans un
pays où les talents sont sacrifiés sur l’autel de l’injustice, la méchanceté
gratuite, l’aigreur, tout ceci au nom du tristement célèbre mot désigné sous l’appellation
de "la Béninoiserie". C’est ce qu’a dénoncé l’écrivain béninois, Paul
Hazoumè, dans son ouvrage intitulé Doguicimi, en ces termes : «
Les Danxomènous feraient de rapides progrès dans la voie du perfectionnement,
s’ils pouvaient comprendre qu’ils doivent s’efforcer d’égaler au lieu
d’égaliser. ». Il sera renchéri dix années plus tard, plus précisément en 1948,
par le philosophe français, Emmanuel Mounier, dans son ouvrage baptisé L’Eveil
de l’Afrique noire : « Le Dahomey est le Quartier latin de
l’Afrique, mais cet intellectualisme fait de méchanceté et de mesquinerie est
de nature à retarder le développement du pays.» Pour nous en tout cas, il n’est
point question de nous souscrire à cette logique rétrograde pour continuer de
faire gonfler aux médiocres du secteur des arts et de la culture, leurs
muscles, afin qu’ils continuent de faire croire qu’ils sont les meilleurs. De
toute façon, nous y veillerons. Et désormais, les meilleurs seront célébrés et
les médiocres découragés.
Donatien GBAGUIDI
Source: L'Evénement Précis
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