De la parole. Pas n’importe quelle parole. La parole présidentielle. Mais portée, par une personne
toute aussi digne de foi. Le Directeur du Fonds des arts et de la culture (DFAC),
Gilbert Déou Malè. Une parole sacrée donc qui, portée, a produit des effets
incommensurables au sein des acteurs culturels. Fortement mobilisés le samedi
22 avril 2017 au Stade de l’Amitié Général Mathieu Kérékou de Kouhounou, ils
ont laissé éclore leur joie pour la bonne nouvelle que portait cette parole sacrée. Cette bonne nouvelle, c’est le
remboursement décidé par la présidence, des avances sur financement des
projets culturels de la saison
artistique 2015-2016. Des avances gelées pour des soupçons de dettes
contractées qui devinrent une querelle agaçante entre le Ministre Ange N’Koué
et le DFAC. Une querelle qui, parvenue aux oreilles du Président de la
République, a dû précipiter une mission d’audit pour clarifier la situation. Le
rapport des auditeurs promis accablant,
a fini par donner raison aux acteurs culturels pour qui, les avances sur
financement devront être restituées. Bonne nouvelle, s’en était une. Car, le
secteur mis en hibernation sur l’autel des réformes qui tardent à livrer leurs
secrets n’accumulait que des
informations désespérantes pour les acteurs culturels.
Mais depuis l’annonce de
la bonne nouvelle présidentielle pompeusement distillée dans l’opinion par la presse nationale, les jours
s’égrainent, et l’argent refuse de briser les chaines de son geôle pour parvenir à ses destinataires.
Un mois, onze jours bien comptés déjà, et l’espoir né de Kouhounou s’évapore tout doucement sous l’effet de la longue attente inattendue de la concrétisation de la parole
présidentielle portée. De cette attente
qui commence à nourrir le désespoir chez les acteurs culturels, s’ajoute l’assèchement
de toute information relative à cette bonne nouvelle. Toute chose qui nous
contraint à nous référer au doute Cartésien qui, visiblement, nous a échappé
dans cette affaire de parole présidentielle portée. En effet, parlant du doute
Cartésien, Dans « Discours
de la méthode », Descartes nous dit : « A cause que nos sens
nous trompent quelquefois, je voulus supposer qu’il n’y avait aucune chose qui
fût telle qu’ils nous la font imaginer». Autrement dit, on aurait dû remettre
en cause cette parole présidentielle portée, sans s’abandonner à un doute septique nuisible aux
vertus de l’espérance que se doit de cultiver tout être humain. Ce serait une
démarche prudente, véritable échappatoire pour les faux espoirs. C’est ce que
Descartes appelle «
révoquer en doute ». Ce
qui n’est pas, selon les explications
du professeur Alquié, à proprement parler, douter, mais
plus exactement nier, tenir pour faux. Il ne s’agit donc pas là du doute
sceptique, celui de la suspension de jugement qu’incarne le « Que
sais-je »?
Et comme si le destin
s’acharne contre les acteurs culturels, l’Assemblée nationale vient de signer la prolongation de leur attente déjà trop longue. En effet, le
vendredi 26 mai 2017, une
proposition de résolution de l’honorable Dakpè Sossou a fait l’objet en
plénière, de l’examen des députés. Cette
résolution tend à la création d’une commission d’enquête parlementaire,
missionnée pour « vérifier la gestion administrative, comptable, technique
et financière du Fonds d’aide à la culture, de 2008 à 2016 ». Et pour
conduire ces travaux, deux bons mois sont donnés à ses enquêteurs
parlementaires pour déposer leur rapport. Deux mois au cours desquels il est fort à parier qu’aucun décaissement de
fonds ne peut s’opérer des comptes du FAC. Et l’enquête ne démarrera, selon nos
sources bien introduites, qu’après la désignation complète, par chaque
commission parlementaire, des 10 députés
chargés d’exécuter cette mission. Autrement dit, au délai de l’attente de la
constitution de la commission, il faut aussi compter 60 jours avant d’espérer
le bout du tunnel.
Au regard de ces éléments
qui ne défient guère l’évidence, on est bien tenté de croire à présent que
l’annonce de Kouhounou tutoie le canular. Et la meilleure façon de nous
démentir, c’est le paiement réel et intégral, et sans délai, de ces avances sur financement, conformément
à la prophétie du 22 avril 2017. Et seul le Président de la République peut
désormais prendre sur lui, l’initiative
de cette courageuse décision, pourtant libératrice de la parole d’honneur
présidentielle, actuellement mise à rudes épreuves dans le monde culturel.
Donatien GBAGUIDI
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