Dans l’ombre des projecteurs de la régie, les six comédiens s’invitent
sur la scène. Et ce sur un plan scénique
à tableau unique. Quelques secondes plus tard, la lumière de la régie dévoile
le visage des comédiens. Et c’est parti pour la générale du spectacle
"Querelles de Quartier" mis en
scène par Claude Balogoun. C’était le lundi 15 février 2016 à l’Institut français de Cotonou.
Les comédiens sur la scène lors de la générale du spectacle |
"Monsieur le Chef Quartier, avec vous, pas de 3ème
mandat". C’est l’intrigue qui plonge le spectateur dans cette satire
politique, totalement iconoclaste. C’est un conte théâtralisé que
propose Claude Balogoun qui emprunte aussi bien à la tragédie qu’à la
comédie. La fonction pluridimensionnelle du spectacle accroche le spectateur
pendant 45 minutes environs. Le
spectacle est vivant, les spectateurs émus. Et c’est le premier germe de succès
que porte cette création.
Le second germe de succès réside dans la pertinence et
l’actualité du thème. Il s’agit de la
problématique de l’alternance au pouvoir
dans les pays africains. Engagée aux côtés des démocrates, la création dénonce
les dictateurs déguisés en démocrates, un problème qui se pose avec acuité dans la
plupart des pays africains. Nous y sommes d’ailleurs en plein au Bénin où tous
les coups semblent être permis entre les acteurs politiques qui ne tarissent
pas d’imagination pour s’affronter sur le chemin de l’alternance au pouvoir.
Le 3ème germe de succès de "Querelles de Quartier",
ce sont les comédiens. Ils sont d’abord et avant tout, des professionnels du
théâtre ou du cinéma. On y voit à titre illustratif, Giovani Houansou, Didier
Sèdoha Nassègandé qui, avec leur taille effilée enrichie par leurs
barbichettes, se plaisent bien dans leurs différentes répliques. L’humour en
sus en ajoute à la gaité du spectateur. De l’autre côté, les deux comédiennes.
Lydie Chokki et Fidèle Gbégnon, respectivement
parfaites, dans leurs rôles de
mégères et de femme du chef quartier. Et puis il y a Souleman Laly et Claude
Balogoun. Le premier, auréolé par sa taille imposante, a le profil du rôle du
garde-de-corps du Chef de quartier qui lui est attribué. Le second, une bête de
la scène reconnue depuis les heures de gloire du théâtre Wassangari, y apporte
son expérience. Et ensemble, les six comédiens s’abandonnent aux jeux de scène
qui se laissent déguster avec plaisir par les spectateurs.
Et pourtant, il y a des
pièges à éviter!
"Querelles de Quartier" tombe à pic dans
l’actualité politique béninoise. Il est donc à craindre que les chapelles
politiques s’en saisissent pour servir leurs causes. Et si elles le
réussissent, la création souffrira de sa virginité et de sa crédibilité. Toutes choses qui pourraient laisser
croire à une création commandée.
L’autre piège qu’il faut éviter pour permettre à
"Querelles de Quartier" de subir son inévitable ascension, c’est l’autosatisfaction.
En effet, il est vrai qu’à la générale, le public a applaudi un spectacle
plaisant et bon à vivre. Se complaire dans une
autosatisfaction sans des revues permanentes et approfondies des jeux de
scène et de leur réadaptation au texte
pourrait alourdir les déchets lors des prochaines représentations. Toute chose
qui pourrait déteindre sur la qualité du spectacle et rendre le jugement des critiques
de théâtre plus sévère. Et en parlant de réappropriation du texte et de sa
réadaptation plus stricte aux jeux de scène, les comédiens Lydie Chokki et Souleman Laly sont les plus indexés.
Donatien GBAGUIDI
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