vendredi 19 février 2016

Théâtre: "Querelles de quartier", une promesse de qualité sur les planches



Dans l’ombre des projecteurs de la régie, les six comédiens s’invitent sur la scène. Et ce sur  un plan scénique à tableau unique. Quelques secondes plus tard, la lumière de la régie   dévoile le visage des comédiens. Et c’est parti pour la générale du spectacle "Querelles de Quartier" mis en  scène par Claude Balogoun. C’était le lundi 15 février 2016  à l’Institut français de Cotonou.


Les comédiens sur la scène lors de la générale du spectacle


"Monsieur le Chef Quartier, avec vous, pas de 3ème mandat". C’est l’intrigue qui plonge le spectateur dans cette satire politique,  totalement  iconoclaste. C’est un conte théâtralisé que propose  Claude Balogoun qui  emprunte aussi bien à la tragédie qu’à la comédie. La fonction pluridimensionnelle du spectacle accroche le spectateur pendant 45 minutes environs.  Le spectacle est vivant, les spectateurs émus. Et c’est le premier germe de succès que porte cette création.
Le second germe de succès réside dans la pertinence et l’actualité du thème. Il s’agit  de la problématique de  l’alternance au pouvoir dans les pays africains. Engagée aux côtés des démocrates, la création dénonce les dictateurs déguisés en démocrates,  un problème qui se pose avec acuité dans la plupart des pays africains. Nous y sommes d’ailleurs en plein au Bénin où tous les coups semblent être permis entre les acteurs politiques qui ne tarissent pas d’imagination pour s’affronter sur le chemin de l’alternance  au pouvoir.
Le 3ème germe  de succès de "Querelles de Quartier", ce sont les comédiens. Ils sont d’abord et avant tout, des professionnels du théâtre ou du cinéma. On y voit à titre illustratif, Giovani Houansou, Didier Sèdoha Nassègandé qui, avec leur taille effilée enrichie par leurs barbichettes, se plaisent bien dans leurs différentes répliques. L’humour en sus en ajoute à la gaité du spectateur. De l’autre côté, les deux comédiennes. Lydie Chokki et Fidèle Gbégnon, respectivement  parfaites, dans leurs rôles  de mégères et de femme du chef quartier. Et puis il y a Souleman Laly et Claude Balogoun. Le premier, auréolé par sa taille imposante, a le profil du rôle du garde-de-corps du Chef de quartier qui lui est attribué. Le second, une bête de la scène reconnue depuis les heures de gloire du théâtre Wassangari, y apporte son expérience. Et ensemble, les six comédiens s’abandonnent aux jeux de scène qui se laissent déguster avec plaisir par les spectateurs.

Et pourtant, il y a des pièges à éviter!
"Querelles de Quartier" tombe à pic dans l’actualité politique béninoise. Il est donc à craindre que les chapelles politiques s’en saisissent pour servir leurs causes. Et si elles le réussissent, la création souffrira de sa virginité et de  sa crédibilité. Toutes choses qui pourraient laisser croire à une création commandée.
L’autre piège qu’il faut éviter pour permettre à "Querelles de Quartier" de subir son inévitable ascension, c’est l’autosatisfaction. En effet, il est vrai qu’à la générale, le public a applaudi un spectacle plaisant et bon à vivre. Se complaire  dans une  autosatisfaction sans des revues permanentes et approfondies des jeux de scène et de leur réadaptation au  texte pourrait alourdir les déchets lors des prochaines représentations. Toute chose qui pourrait déteindre sur la qualité du spectacle et rendre le jugement des critiques de théâtre plus sévère. Et en parlant de réappropriation du texte et de sa réadaptation plus stricte aux jeux de scène, les comédiens Lydie Chokki et  Souleman Laly sont les plus indexés. 


Donatien GBAGUIDI



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