Préface
Je ne sais
quel(s) sentiment(s)va (vont) vous envahir quand vous ouvrirez cet
ouvrage ? Tristesse, colère, indignation, émoi, frissons… ? Eh bien,
chers lecteurs, tout cela m’a envahi, successivement. Puisque j’avais la charge
d’une préface, je ne pouvais me dérober à lire ni relire ce cimetière des
Artistes. Et à force d’y revenir, mon indignation –qui avait relayé ma
tristesse de début- a progressivement fait place à un puissant émoi, puis à des
frissons. La peur. La peur de mourir, moi-même Artiste. Parce que j’ai vu,
feuilletant les pages de cette Culture
en deuil, la négligence totale et l’oubli où mon pays laisse les créateurs qui,
après avoir servi la nation de toutes leurs flammes, tombent malades. Souvent
sans soutien. Qu’ils se débrouillent, eux-mêmes !
En effet, cet
ouvrage d’environ 170 pages, nous plonge dans le Carnet noir des artistes
décédés au cours de l’année 2013. La chronologie a ouvert le feu par Alokê,
épluchant, comptabilité lugubre, les derniers instants de Zouley, Riss Cool,
G.G. Vickey, Tougan Amassè, Leonid Bento, alias Bluv du groupe All Baxx, pour
finir par ériger le catafalque de Djibril Sagbohan. Eh oui, ils sont tous morts
en 2013. Tous musiciens et/ou artistes chanteurs. De la musique moderne (G.G.
Vickey, Bluv) comme de la traditionnelle pure (Alokpon, Tougan Amassè, Alokê)
ou de la moderne dite d’inspiration traditionnelle (Zouley, Riss Cool, Djibril
Sagbohan). C’est difficile à soutenir mais je le fais à votre place, cette
cartographie mortuaire. Au nombre de Huit (08), nous avons une femme, Zouley
Sangaré, et sept hommes. Trois (03) trentenaires (Riss Cool, Leonid Bento,
alias Bluv et Djibril Sagbohan), deux (02) quadragénaires ( Zouley Sangaré et
Alokê), deux (02) septuagénaires (G.G. Vickey et Alokpon) et un (01) octogénaire
(Tougan Amassè)…
Retenons que des
huit décédés, Cinq ont moins de cinquante ans. Donc en pleine carrière, et qui
ont encore du génie et de l’énergie à donner pour servir la nation, égayer et
conscientiser les citoyens. C’est inquiétant d’autant qu’ils sont morts de
maladies, chose qu’on peut prévenir, qu’on doit prévenir si le pays avait une
véritable politique de sécurité sociale déployée à l’endroit des artistes. Plus
de cinquante ans après nos indépendances, nous n’avons pas été capables de
doter notre pays d’une couverture sociale avérée au profit d’une grande frange
de la population. Les laissant à leurs propres comptes. Et nous sommes si
conscients de notre faute que, souvent, dans leurs dernières minutes, nous
avons tout fait de notre possible pour les sauver. Oui, le BUBEDRA a ouvert sa
tirelire, le généreux Fonds d’Aide à la Culture, ce médecin financier pour la
mort, s’est démené, et les soutiens individuels et corporatistes se sont eux
aussi fendus de leurs efforts. Mais… Dieu a donné, Dieu a bien évidemment
repris. Cependant, il n’aurait pas repris si tôt et si souvent, si, au lieu du
« Médecin après la Mort » ou de ce que j’ai appelé « Le Médecin
pour la Mort », nous avions mis en place une politique de couverture
sociale préventive. Dieu qui aime tant Ses créatures, n’aurait jamais aimé les
reprendre si jeunes, si nos associations faîtières et corporatistes, au lieu
que leurs dirigeants respectifs, et tous, rasent et longent les murs du
Ministère et autres autorités à la recherche de gains et avantages personnels,
exigeaient des priorités profitables à tous. Du moment que nous choyons mal les
créatures de Dieu, Il ne peut que les Reprendre, à voir surtout les conditions
lamentables que nous leur faisons par nos cupidités.
Il me semble
donc temps, qu’au sortir de cet ouvrage dont je vous impose la lecture et la
méditation, nous nous ressaisissions. Chacun en ce qui le concerne. Le simple
citoyen, les pouvoirs publics et/ ou décentralisés, les politiques…Mais
surtout, nous autres artistes. Que nous crions davantage, pour ceux dont le
métier est de crier, que nous agissions pour créer ou pousser à créer, ne
serait-ce qu’une mutuelle de santé pour les Artistes. Mais en attendant,
puisque les choses prennent tellement de temps chez nous, j’exhorte les responsables
de nos associations et fédérations faîtières à la Honte de l’action, pour
initier par le Fonds d’Aide à la Culture, ce que j’ai déjà appelé ailleurs la
CIS, la Carte d’Identité Sanitaire de tous les artistes. Cela va nous permettre
de leur faire faire des bilans de santé pour détecter, à l’avance, les maux
dont ils souffrent ou dont ils pourraient à l’avenir souffrir. Une telle
démarche permet d’anticiper tant médicalement que par la rupture des
comportements nocifs que traînent souvent les créateurs, comme la drogue,
l’excès ou l’abus d’alcool et autres
psychotropes tolérés à leur dopage d’avant-scène.
Vivement que
cette Culture en deuil nous réveille à préserver tant d’autres jeunes artistes
dont la vie semble bien menacée par l’absence d’action d’envergure pour
protéger cette race. Certains me diront, « Ils n’ont qu’à cesser de se
droguer ou de cultiver les comportements nocifs ». Je suis entièrement de
leur avis, s’ils peuvent déjà réussir à dissuader les patrons de coucher avec leurs
secrétaires, les enseignants de profiter de la jeunesse de leurs élèves filles,
les gynécologues de piéger et de harceler de nombreuses femmes mariées malgré
leur résistance. « J’aime bien les donneurs de leçons surtout ceux
qui réussissent à assimiler les leurs », ai-je déjà écrit quelque part. Et
comme à chacun son défaut, profitons des occasions que nous offre le Seigneur
pour nous corriger… Lisons et méditons donc Culture en deuil pour que vivent
les artistes.
HOUNKPÊ Erick-Hector
Artiste et
Consultant.
C'est vraiment touchant ces pertes. Paix à leur âme.
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